1ère Rencontre de l'APM du 7 juin 2012
« CE QUE ME DISENT LES MYTHES »

La soirée du 7 juin dernier au café François Coppée (à l’angle de la rue de Sèvres et du boulevard Montparnasse dans le 7ème arrondissement de Paris) a permis de réunir pour cette nouvelle édition des Rencontres de la Psychologie de la Motivation une cinquantaine de personnes venues écouter la conférence de Maridjo Graner. « Ce que les mythes ont à me dire ».

Après les commandes de boissons, comme convenu à 19 H 30 nous sommes tous là à écouter Maridjo qui a écrit la préface de la dernière parution de Paul Diel:" Ce que nous disent les mythes", paru en janvier 2012.

Pierre CANOUÏ a rappelé que la date de cette causerie est celle de deux anniversaires : celui du 40ème anniversaire de la mort de Paul DIEL (1893-1972) et du 60ème anniversaire de la parution du livre "Le Symbolisme dans la mythologie grecque" (1952)

Maridjo Graner a commencé par définir ce que sont les mythes, puis ce qu'ils nous révèlent et à quels besoins ils répondent.

Les mythes sont une tentative de réponses à deux formes d’angoisse : celle de la mort et celle de l’insondable mystère de la vie et de son sens.

Comment apporter une réponse à l’inexplicable question de ce qui se passe après la mort et la question de l’origine et de la finalité de la vie, de ma vie ? Il est possible que les hommes aient eu besoin de "rêver" une explication pour calmer cette angoisse.

Dans son œuvre, Paul Diel décrypte les mythes et montre que les cosmogonies sont les récits de la création, une explication imagée, imaginée, de la sortie du chaos et de la construction d'un monde organisé où l’homme  trouvera sa place.

D'autre part les combats héroïques mettent en scène un héros qui doit combattre un monstre ou un démon (ses propres tentations ) avec les armes prêtées par un dieu (ses propres qualités positives). Ces récits sont destinés à guider l'homme dans sa recherche du sens de sa vie.


L’intervention de Maridjo Graner, captivante et riche, a suscité un vif débat avec un public attentif tout au long de la conférence et désireux d’échanger sur des sujets tellement actuels
Parmi les nombreuses questions du public :

- Pourquoi Paul Diel a-t-il travaillé surtout sur les mythes grecs ? Il y en a tant d’autres. Ne peut-on dire qu’il y a une dimension commune quelles que soient les origines culturelles ? Et peut on supposer que la délibération intime est la même pour tous les hommes ?

Dans les combats héroïques indiens, je pense que certaines images doivent correspondre à leur univers imaginaire mais la structure des mythes dans cette floraison d’images est commune à toutes les cultures à fondement mythique.


-Les femmes dans les mythologies : Toutes les femmes des récits sont des séductrices : Eve – Pandore – Lilith –Méduse– Les sirènes. Est-ce que cela voudrait signifier que les femmes entraîneraient nécessairement vers le malheur. Ce sens serait-il universel dans les mythes ? Cela incite à une dévalorisation bien injuste des femmes.


Ceci n’est pas tout à fait vrai ; Isis, Héra, Athéna, ce sont bien des figures mythologiques bienfaitrices. N’oublions pas qu’à la fin du mythe de Pandore, c’est l’espoir qui sort de la Boîte. On peut néanmoins constater la dimension machiste des mythes, car ils sont les créations de l’homme…et les femmes, réellement séduisantes pour l'homme, deviennent le symbole de la séduction souligne un participant.

- Et les rêves ?

On trouve dans les rêves des images mythiques mais aussi des éléments de la vie du rêveur.

- Un participant exprime que l’être humain est seul face à ses motivations, il vient au monde totalement dépendant de ses géniteurs avec leurs fausses motivations. L’enfant est accompagné d’une double tâche exaltée, celle de ses deux parents et la sienne propre. Il s’agit de mettre au clair l’héritage reçu qu’il ne doit pas confondre avec sa propre vanité. C’est lourd et ce n’est pas facile….c’est l’histoire de chaque vie.

Il est difficile de dire ce que l’on va faire de cet héritage. Les valorisations sont derrière – Les héritages sont profondément ancrés et inconscients.

-Les mythes ont une signification psychologique que nous tentons de lire. Mais les grecs avaient ils conscience de ce que signifiaient les mythes ?

Nous avons une façon de nous exprimer par des concepts mais le mythe parle à l'âme avec des images au delà et en deçà du langage.

-Notre époque a peut-être encore besoin de mythes et de poésie.

En effet, la fonction symbolisante est toujours opérante. On pourrait dire plaisamment que la reine d’Angleterre est par exemple un mythe partagé par tout un peuple.

-Le mythe est aussi un outil thérapeutique – l’imagerie symbolisante utilisée dans le mythe permet de métaphoriser la souffrance dans les thérapies. C’est ce que proposent certains thérapeutes. Avec des images, des récits, des narrations, on peut devenir capable de parler de sa souffrance sous forme de métaphore pour la dé-diaboliser et l’externaliser et parfois l’apaiser.

- Il semble qu’on manque cruellement de lecture symbolique. Autrefois, les philosophes, les religieux, les conteurs prenaient le relais, mais aujourd’hui nous avons perdu cela : la compréhension symbolique de sa vie. Il nous manque des facilitateurs de compréhension de notre modernité.

- Dans notre époque plus individualiste, les mythes sont moins généralisables. Ne sommes nous pas en train de glisser du mythe vers l’art ?


La mythologie n’a jamais cessé, la figure mythique de Don Quichotte, de Faust, sont des figures très proches des figures mythiques. Il y a une frontière floue entre la création artistique et la création mythique.

- Diel montre à travers son travail sur les mythes qu’il y a une légalité dans notre fonctionnement psychique.

Ce que les mythes nous apportent c’est un mieux-vivre et ils nous aident à accepter notre disparition, à faire face à ce sentiment d’inachevé…

Plus on s’est accompli dans sa vie moins on a peur de disparaître, c’est paradoxal…

En résumé dit Pierre Canoui:

L’idée principale c’est que tous les mythes, nous éclairent sur notre fonctionnement psychique.

Nous avons tous envie d’être un héros vainqueur. Au fond, à des moments de notre vie nous sommes tous des héros de la mythologie : Jason – Bellérophon– Je suis dans toutes les facettes de ces mythes. Ce que je retire de la sagesse des mythes : tous nous avons la possibilité d’avoir un cœur pur, dans la réceptivité de notre part de divin pour être à même de produire notre mythe.

Cela nous met en contact avec notre inconscient, notre émotion juste et l’expression artistique surconsciente.

Osons inventer, il y a peut-être quelques pistes – c’est une invitation à la créativité.

Voilà les nombreuses questions suscitées par ce thème, le débat était riche et dense.


Zahra Sayad

(relu par Mardjo Graner et Pierre Canouï)

(1) En référence au livre de Paul Diel « Ce que nous disent les mythes »
- date de publication: 18 janvier 2012 - Série: PAYOT GD FORMAT