Séminaire annuel mars 2011 (suite 4)
Par Christian Robin et Alain Bavelier

Atelier « Ecriture, créativité et introspection »

« On écrit pour exprimer ce dont on ne peut parler, pour libérer tout ce qui, en nous, était empêché, claquemuré, prisonnier d’une invisible geôle. Et qu’il n’y a pas de meilleure confidente que la page blanche à laquelle, dans le silence, on délègue ses obsessions, ses fantasmes et ses morts. »
Jérôme Garcin - Olivier (© Gallimard, 2011)
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L’écriture au service de l’introspection
En quoi l’écriture peut-elle aider à faire jaillir des pensées et pulsions subconscientes qui vont favoriser une meilleure introspection en fournissant un matériau différent ?
En quoi une pratique d’écriture régulière peut-elle aider à structurer la pensée ? A analyser les « incidents » de la vie quotidienne ou/et les « accidents » d’une vie passée, puis à « dénouer la pelote » ?

L’écriture au service du rêve et de l’analyse
Pour pouvoir interpréter un rêve avec profit, le récit passe le plus souvent par l’écriture qui permet ensuite au rêveur de prêter attention aux mots choisis et au rythme des phrases de la narration onirique.
L’écriture sert également à l’analyse de faits traumatiques passés, ou d’aspérités plus ou moins importantes, d’incidents ou d’accidents de la vie quotidienne.

Rendre son écriture plus créative
Comment générer une écriture « éveillée » (au sens du « rêve éveillé »), plus créative, plus surprenante, davantage susceptible de faire naître des émotions liées à des événements vécus ?

Quelle pratique d’écriture quotidienne ? Quel intérêt à une telle discipline ? Quels outils créatifs pour générer une autre écriture ?

Telles sont quelques-unes des réflexions et interrogations proposées en ouverture de l’atelier des 26 & 27 mars qui s’est déroulé comme suit.

26 mars après-midi – 1ère partie : « Je me souviens » avec Georges Perec
Afin de renforcer un lâcher prise au service d’un meilleur ressenti, d’une plongée plus profonde au cœur de ses émotions, l’atelier débute par une séance collective de sophrologie. Ce 1er temps de relaxation intègre une lecture d’une sélection d’extraits du livre « Je me souviens » de Georges Perec.


Dans un 2ème temps, chaque participant rédige un texte de ses propres souvenirs, sa propre liste de « Je me souviens » à la manière de Perec.


Dans un 3ème temps, les textes obtenus sont lus à tous, puis servent de base à une analyse introspective bienveillante partagée par le groupe. Au-delà du vécu des participants et des clés que chacun peut en retirer, les deux animateurs resituent une méthodologie d’introspection à partir d’une matière première écrite.


Dimanche 27 mars matin : L’exploitation de l’impondérable
D’abord, chaque participant choisit un micro-événement récent (la veille ou la semaine passée), ayant généré une émotion inattendue (positive ou négative) et/ou qu’il considère a posteriori comme disproportionnée.
Avec les mêmes objectifs de lâcher prise que la veille, une séance de sophrologie concentre alors son attention sur le micro-événement choisi (chronologie, personnages, lieux, couleurs, ombres & lumières, parfums & musiques, etc).


Puis chacun raconte par écrit cet événement en se focalisant sur l’émotion ressentie et ses différentes manifestations physiques ou psychologiques.
Enfin, les textes sont lus à tous et servent de base à une analyse introspective bienveillante, dont la méthodologie est à nouveau resituée par les animateurs, soit dans une pratique thérapeutique, soit dans une démarche quotidienne personnelle.


Cette analyse en commun appelait quelques indications préalables sur la méthode à suivre. Il y avait une difficulté : certains participants connaissaient depuis longtemps le calcul psychologique ; d’autres n’en avaient jamais entendu parler. Il ne fallait donc ni lasser les uns, ni effrayer les autres. On a donc pris le parti de faire un bref exposé du calcul fondé sur la description de mouvements intérieurs naturels et évidents pour chacun.


Un « carré des faux motifs » a été dessiné au tableau, partagé par un trait vertical : à gauche, le sentiment que chacun a de lui-même ; à droite, le sentiment qu’il a des autres dans son for intérieur. Sur le côté gauche (soi-même), on a placé un point, un curseur, correspondant à l’état d’humeur actuel. Ce curseur monte et descend constamment entre l’exaltation, au sommet, et le découragement, en bas. Les extrêmes peuvent être désignés par les symboles : +++ et - - -. Le va-et-vient du curseur donne une image de l’ambivalence qui pousse tout être humain à des excès contraires, très fragilisants dans la mesure où ils s’appellent et s’amplifient mutuellement, l’exaltation préparant nécessairement la chute et inversement.
Le côté gauche est relié au côté droit (les autres) par deux flèches horizontales représentant la projection de nos sentiments vers le monde extérieur, et leur effet en retour sur nous-mêmes. Sur le côté droit, symétrique au côté gauche, on observe le même mouvement incessant entre engouement et déception. Notre exaltation, euphorique ou angoissée, se projette sur les autres pour y chercher aussi bien la confirmation de nos prétentions (+++) que l’excuse de nos insuffisances (- - -).
On peut aussi tracer des diagonales entre les 4 points du carré, en sorte que ce schéma_ qui est celui du calcul diélien_ épuise en principe toutes les combinaisons possibles et permet de les anticiper. Il aide à sentir directement le jeu des forces intérieures qui gouverne la fluctuation des désirs, et permet d’en saisir rapidement la structure logique. Il en fait sentir le côté biologique et non-moralisant ; il remet à sa juste place cette forme précieuse de jugement intuitif qu’on appelle le bon sens : un état d’accord avec soi-même qui correspond à la prise de conscience d’un désir authentique.

Cette première approche est très sommaire. Il serait utile de faire des exercices pratiques afin de mieux percevoir les sentiments vécus et parvenir plus facilement à un meilleur accord avec soi-même et avec autrui. Il serait très intéressant de sentir qu’elle donne leur fondement intime aux approfondissements proposés par Diel dans les domaines de la philosophie et du symbolisme. Bref, qu’elle peut aider chacun à mieux conduire sa propre vie.
Aussi espérons-nous que de nouveaux ateliers permettront de poursuivre ce travail introspectif en commun.

Christian ROBIN
Psychopraticien de la Psychologie de la Motivation, Master Sophrologue Caycédien

Alain BAVELIER
Psychothérapeute, auteur de L’homme et ses motivations (Retz,1998)